Vous trouverez ci-dessous
des articles relatifs à Frédéric Rouge ou relatant
la découverte de l'un ou l'autre tableau peu après sa sortie.
En général, de l'admiration... Pour une meilleure lecture,
les articles ont été recopiés. Souvent l'article
découpé n'avait pas de mention de provenance, ni de date,
ni d'auteur. Dommage...
Pour le quasi-scandale
à propos d' "Une Agonie dans les Alpes", je vous renvoie
à : Agonie
Vous trouverez encore
des articles dans le cadre des différents évènements
mentionnés ci-dessus, Les Expositions, F. Rouge et Urbain Olivier,
Les 80 ans, Citoyen d'honneur, etc.
1er
déc. 1908 - LAUSANNE
Exposition
de peinture à La Grenette
Dimanche
29 novembre, par un temps gris et sombre, s'est ouverte à la Grenette,
pour y durer jusqu'au 26 décembre, la - nous citons le catalogue
(coût, 30 centimes) - " IIe Exposition de l'Association libre
des artistes suisses (sécession). " Que ce titre un peu farouche
n'effarouche personne : il n'y a rien de subversif dans les 147 uvres
d'art exposées. Un peu d'impressionnisme par-ci par-!à,
mais en fait la " sécession " est plutôt conservatrice,
et la tendance moyenne est modérée, classique même.
La perle de l'exposition de M. Herzog est la très jolie vue plongeante.
sur le château de Glérolles (No 60).
Frédéric Rouge, d'Aigle, - maintenant d'Ollon, - est, malgré
l'envie dénigrante, et, il faut le dire aussi, malgré une
certaine mollesse au travail que l'on voudrait secouer dans l'intérêt
de l'art - est un bon peintre que l'on appellera grand quand il sera mort,
en quoi il n y a rien qui presse, Dieu merci.
Rouge se présente à nous avec deux numéros de valeur,
120 et 121. Le 120 est un assez grand tableau : " Le soir sous les
châtaigniers ", que l'on a pu voir dans une vitrine du Grand-Chêne,
récemment. Nous nous souvenons de l'y avoir contemplé pieusement,
avec le mystère de sa pierre moussue qui semble druidique, tandis
que des gamins, du haut d'une fenêtre, jetaient sur les passants
des coquilles des noix
L'autre tableau, intitulé " Pour les dix heures " est
notre favori ; ce sera celui de beaucoup. C'est un très joli portrait
de jeune fille vue de profil, avec une longue tresse noire. Elle porte
les " dix heures ", un falot tempête dans une main, un
savoureux morceau de fromage dans l'autre. N'oubliez pas ce portrait :
vous le trouverez tout de suite, à droite en entrant. C'est bien
de chez nous, et c'est du meilleur Frédéric Rouge, de celui
qu'on aime retrouver au Musée Arlaud.
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Frédéric
ROUGE (27-04-1867 - 13-02-1950) - Article de Maurice Porta
Bourgeois d'Aigle
Le peintre vaudois Frédéric Rouge est né à
Aigle le 27 avril 1867. A 16 ans, il entra à l'Ecole des Beaux-Arts
de Bâle dont il sortit premier après une année d'études,
révélant déjà les plus artistiques dispositions.
Après un stage de quelques mois chez le peintre d'histoire Walter
Vigier, à Soleure, il alla étudier durant trois hivers à
Paris, où il suivit les cours de l'Académie Julian. Il fit
également un séjour à Florence où il étudia
les peintres italiens. Après quoi, il rentra au pays, d'abord à
Aigle, puis à Ollon, où il vécut avec sa femme et
ses trois filles.
Avec son veston de velours, son large feutre noir, sa barbe, son regard
à la fois perspicace et bienveillant, Rouge était une figure
d'artiste bien caractéristique, connue, estimée, aimée
de tous.
Il est le peintre de la Vallée du Rhône et des Alpes Vaudoises,
dans leurs sites familiers ou grandioses comme dans leurs types: bûcherons,
vachers, chasseurs.
Mais il n'a pas été que cela et son oeuvre est extraordinairement
diverse: sujets de genre, paysages, portraits, illustration, vitraux,
il a tout abordé avec bonheur.
Car Rouge a compris l'art, son art à l' " ancienne manière
", qui était fait de probité, d'observation et d'effacement
de l'artiste devant son sujet, lequel seul importe. De conscience aussi
; son atelier était plein d'esquisses, d'études, de détails,
d'attitudes ou de gestes repris dix fois avant d'être admis dans
l'uvre définitive.
Celle-ci est considérable. Citons d'abord le portrait d'Urbain
Olivier, l'écrivain vaudois, qui, exposé au Salon de Paris,
obtint un vif succès. La liste des portraits est immense. Dans
les tableaux de genre, les plus connus sont: " Le Retour du bûcheron
", " La Ferme vaudoise ", " L'enfant des Bois ",
" Les fées de Nairevaux ", " Une agonie dans les
Alpes ", " Chevaux dans la plaine du Rhône ", "
Le Braconnier " et tant d'autres.
Dans tout ce que Rouge a peint l'on trouve la vie-même, familière,
aisée, naturelle. Et dans toute son essence, dans toute sa signification
profonde, son âme, sa poésie. Ses paysages, lumineux et doux,
on dirait qu'ils se sont donnés à lui, avec amour, totalement.
Ils sont mieux que beaux; ils vous prennent, vous font brusquement, délicieusement
rêver. Et ses types, il semble qu'on vient de les croiser et qu'on
les reconnaît, avec amitié. Ils sont vrais, davantage, presque,
qu'ils ne le seraient en chair et en os, tellement le peintre les a saisis
dans leur caractère propre, fouillés, médités.
Rouge n'était pas de ceux qui recherchent le bruit, les honneurs.
Mais les hommages mérités, du grand public, lui sont venus
depuis longtemps et tout naturellement. Des articles élogieux sur
lui ont paru un peu partout, et les amateurs se sont disputé ses
tableaux, en son temps.
Tout le pays, à un moment donné, s'est reconnu, s'est senti
exprimé avec une force, une éloquence saisissante.
La " Gazette de Lausanne " disait en citant, à l'époque,
un nouveau tableau de R. Rouge: " Il est intitulé " La
mare " . Cela a été pris quelque part, au fond de la
plaine du Rhône, dans ce pays qui est celui du peintre, et d'où,
partout, on voit les Alpes et le lac. Et c'est exquis. On retrouvera,
dans cette toile, toutes les qualités qui sont celles de Rouge:
la précision à la fois, la fermeté et la robustesse
de l'artiste qui connaît à fond les procédés
de son métier, et puis, l'intense poésie qui, à son
appel, s'est dégagée du sujet traité. F. Rouge a
cette probité des grands peintres qui savent exprimer toute la
profonde beauté du modèle choisi, en s'effaçant eux-mêmes
derrière leur oeuvre. Il y a longtemps que Rouge est un de nos
beaux peintres mais plus il va, plus il sait condenser et approfondir
sa vision en la simplifiant, en délaissant l'accessoire pour ne
voir que l'essentiel. "
Tiré
d'une notice de Maurice Porta.
[Maurice Porta à la Feuille d'Avis de Lausanne 1920-1932]
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